Bien, le film d'Al Gore. Très bien même. Efficace, émouvant, précis dans les constats. Je ne l'avais pas encore vu. J'ai eu le plaisir d'assister à sa projection deux fois de suite cette semaine grâce aux hasards de la campagne électorale et des soirées sur l'environnement où je suis invité à débattre avec mes concurrents politiques. Si vous n'avez pas encore eu l'occasion de le visionner, je vous le recommande, surtout si vous avez un gros 4x4, que vous le prenez le matin pour aller chercher le pain à 200 m de la maison, que vous avez du simple vitrage aux fenêtres et que vous chauffez à 25° toute l'année avec une vieille chaudière à charbon. Si vous ne vous déplacez qu’à vélo, que vous buvez exclusivement l’eau du robinet, que vous vivez dans une maison passive, que vous ne mangez que des carottes bio et le lait de vos brebis, et que vous vivez en autarcie, allez quand même le voir, la lecture du DVD ne produit que quelques grammes de CO².
Bon documentaire donc, mais malgré tout un goût de trop peu. Il se termine par des recommandations faiblardes, du genre "il faut stabiliser les émissions de gaz à effet de serre aux Etats-Unis". Autant proposer à un cirrhotique de stabiliser sa consommation de 2 litres de rouge par jour en espérant qu’il guérira.
C’est d’ailleurs un constat qu’on peut faire en Belgique. L’alerte est donnée, le tocsin sonne, mais rien ne change vraiment radicalement. Bien sûr certains responsables politiques, certains habitants du Royaume, certaines entreprises prennent des initiatives : panneaux solaires, éoliennes, voitures hybrides, cogénération, font petit à petit leur apparition. Et la Wallonie n’est pour une fois pas à la traîne grâce à nos bons Ministres cdH Lutgen et Antoine et leur plan « Air-Climat » en 82 mesures. Ce n’est pas rien. C’est même très bien, surtout quand on voit ce qu’ECOLO réalise quand il est au pouvoir.
Mais tout cela ne semble pas vraiment faire le poids par rapport aux dérèglements climatiques : en Belgique, le mois d’août s’invite en avril, l’Espagne est dévastée par des torrents de boue, les forêts américaines brûlent. Les superlatifs s’invitent aux prévisions météo chaque soir à la télé. Tout se passe comme si chacun doutait encore des prévisions catastrophiques des climatologues. Pourtant le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) vient de tenir trois conférences aux conclusions très claires : oui, la planète se réchauffe rapidement et cela va bouleverser les écosystèmes (conférence de Paris), oui l’activité humaine est responsable de ces bouleversements (conférence de Bruxelles), oui on peut changer la donne si on diminue drastiquement nos émissions de gaz à effet de serre (conférence de Bangkok).
Ce qui manque c’est un plan avec des objectifs précis, à court et à long terme, où l’impact et l’efficience de chaque mesure (mobilité, industrie, bâtiments) est calculé et mesuré, où l’on arrête de parler en pourcentage par rapport à 1990 (personne ne comprend un indicateur aussi abstrait), mais en tonnes d’émissions de carbone par an et par habitant et où l’Etat et les collectivités (écoles, administrations, universités, hôpitaux,…) montrent l’exemple. Bon, on disait que le prochain gouvernement saura y faire.